Karadima

Depuis le dbut de sa papaut en 2013, le pape Franois se fait remarquer et admirer par ses prises de position tonnamment progressistes par rapport la justice sociale et l'environnement. Et il dnonce haut et fort le clricalisme qui existe dans l'glise catholique et a pos de nombreux gestes pour montrer qu'il cherche, comme pape, s'en loigner : il a choisi de vivre dans la rsidence modeste Santa Marta au lieu des appartements pontificaux traditionnels; il a choisi une voiture usage pour ses dplacements au lieu d'une limousine; pour sa premire sortie officielle, il a choisi Lampedusa, o arrivent rgulirement de l'Afrique de milliers de rfugis que l'Europe cherche refouler; il invite parfois les exclus sa table pour partager un repas avec lui.
Tout cela tant reconnu, Ovide Bastien argumente dans ce livre que le pape Franois demeure toujours immerg dans le clricalisme. Et pour le dmontrer, il dcrit en dtail ce qu'il appelle la pire gaffe du pape jusqu' maintenant, celle qu'il commettait, lors de son sjour au Chili en janvier 2018, dans l'affaire Fernando Karadima, prtre grand abuseur de mineurs et de jeunes. Une gaffe qui a rapidement fait la une dans le monde entier et clabouss sa crdibilit, qui, depuis le dbut de sa papaut avait t remarquable.
On sait que le pape s'est rapidement ravis, a envoy deux enquteurs au Chili, lu leur rapport dvastateur, invit chez lui Rome trois des victimes de Karadima, s'est excus de sa gaffe, laquelle, il a insist, provenait du fait qu'il avait t mal inform, et, enfin, a rprimand publiquement les vques chiliens en les convoquant Rome o ils soumettaient collectivement leur dmission.
Ce retournement spectaculaire, selon Bastien, reprsente surtout une tentative du pape de restaurer sa crdibilit comme leader. En attribuant sa gaffe au fait d'avoir t mal inform, il transformait l'piscopat chilien en brebis expiatoire, amenant l'opinion publique se dtourner de son propre comportement clricaliste envers les victimes et se focaliser carrment sur celui des vques chiliens.
Car l'attitude du pape Franois envers les victimes de Karadima, qui, cause de la tempte mdiatique, claboussait sa crdibilit, ne diffre en rien de celle qu'il adoptait envers les victimes de prtres abuseurs en Argentine lorsqu'il tait archevque de Buenos Aires, et, en 2020, envers les victimes de son ex-bras droit au Vatican, le cardinal australien George Pell.